Ce n'est pas normal, nous ne sommes pas normaux.

Heaven & Silver

Ce doit faire quoi ? Un peu moins d'une semaine que je ressens se sale truc en moi. Une douce sérénité, un amour pour tout. Je sais que ce n'est pas normal, rien n'est normal. Au début, j'ai cherché après des explications sur internet mais qui posterais un truc sur un forum du style "Je suis habituellement dépressive et là je me sens bien, pourquoi ?" ou encore "Est-ce que la maitrise des quatre éléments peut influencer mon état dépressif ?" On me prendrait pour une folle. Et peut-être que je le suis finalement. La bibliothèque n'a rien donné non plus. Et j'ai peur de ce qui va se passer sur mon corps. Et si c'était une réaction en chaîne ? Non. Aura. C'est ça ! Evidement ! Quand tout à commencé, une fille bizarre m'avait jeté un truc. Je pensais que c'était une farce comme j'en ai toujours eu l'habitude. Mais non, c'est peut-être ça la clé ! Elle. Mais pourquoi elle m'aurait fait ça ? Enfin c'est... c'est quoi son pouvoir ? On va pas me dire que c'est pas une mutante. Je vais croire personne. Je dois me débrouiller pour la retrouver. Le bon côté des choses c'est que son visage est imprégné dans mon crâne, j'ai une bonne mémoire pour les gens bizarres.

Je claque la porte du motel et démarre mon vieux pick-up tout moche. "Moche" est faible pour décrire le véhicule que je traîne ci et là. Mais pas moyen que je jette la voiture de papa. Il en est hors-de-question. Il faut attendre un moment pour entendre le moteur vrombir. C'est tout un art, j'vous jure. Je tire le frein à main, embraye doucement et me case sur la route. Musique à fond, je récite les paroles des Spice Girl à tue tête jusqu'à arriver au centre ville. Avant mes recherches, je dois passer chercher de quoi manger ce soir. Pizza ? M'ouais, pizza. Il n'y a jamais beaucoup de monde ici, dans cette ville miteuse. C'est ça qui est bien, t'es jamais en retard ici. Sauf quand tu te fais courser par des connards de "chasseur de mutant". Bande de cons. Mes yeux longent la rue à travers ma fenêtre alors que je m'arrête à un feu rouge. Bordel ! Mes yeux font des balles de golf lorsque je vois la fille que je cherchais. L'épicerie attendra. Je tourne rapidement le volant pour me parquer sur le bas côté de la route, feignant l'innocence derrière le bruit des coups de klaxons des chauffeurs mécontents. Je claque la portière avant de traverser la rue en courant, criant presque sur mon interlocutrice. « Toi ! Attends ! » Elle prend peur ou bien elle ne m'a pas entendue ? En tout cas, elle s'enfonce dans une ruelle et je ne compte pas lâcher l'affaire. Je tends ma main vers elle jusqu'à créer une barrière de feu juste derrière son corps. Elle ne peut plus me fuir. Tiens, c'est étrange. Mon pouvoir vient de fonctionner d'un seul coup. Fière de mon coup, je souris doucement avant de me rappeler que je dois lui demander ce qu'elle m'a fait. « C'est toi qui m'a rendue aussi... aussi... Joyeuse ?! » Je crache mes mots, c'est absurde.

Ce n'est pas normal, nous ne sommes pas normaux.

Heaven & Silver

Je ne sais pas vraiment quoi penser. Est-ce que cette personne a fait ça pour mon bien ? Elle a peut-être chercher des choses dans mes pensées ? Plusieurs possibilités s'offrent à moi, plusieurs hypothèses sur le pourquoi du comment. Mais sur le moment même, je me sens vexée. Juste, vexée. Vexée d'avoir été mise à nue par un inconnu, une inconnue plutôt. Inconnue qui fuit rapidement dans la ruelle alors que je cours après, je manque d'ailleurs de me faire écraser par une voiture. Ma paume vers celle-ci, je donne un coup franc vers le véhicule qui se projette rapidement en arrière après avoir rencontré ma bourrasque de vent. Génial, manquait plus qu'faire des victimes. Je jette un coup d'œil craintif vers les individus, aucuns morts et pas beaucoup de dégât. L'arrière de la voiture a juste emboutit l'autre au niveau du parechoc. Pas de mort donc pas de temps à perdre. Je recommence ma course et arrive dans la ruelle. Ma main traverse la largeur de la ruelle pour l'enflammer en créant une barrière de feu afin de la bloquer. Piégée. Je la fixe, surprise de ma propre maîtrise, avant de lui déballer ma première question, les autres suivront dans la foulée. Son regard semble terrifié. Et sans que j'ai le temps de faire quoi que ce soit des... des ailes ?! Elles sortent brusquement de leur dos, ce qui me fait reculer tout aussi brusquement. Je manque même de me ramasser les fesses au sol. Si elle est terrifiée, je le suis probablement tout autant. Nous dirons méfiante pour utiliser le bon terme. « Je... Je suis désolée... » Sa voix tremble, ça me met vachement mal-à-l'aise. Elle ne doit pas avoir peur de moi, je ne suis pas comme ça. Le feu s'estompe lorsque je baisse les mains et que je les enfonce dans les poches de mon jean. Je ne sais même plus quoi dire. « Tu vas me faire du mal ? » Mais enfin ! Non ! Je glousse, je tente de reprendre un air menaçant et ne pas me laisser diriger par mes émotions. Ce visage froid se brise sur mon visage au simple fait de voir cette fille terrifiée. « Je... Non. Je te ferai pas de mal ! Explique moi juste ce que... Mais pourquoi je suis comme ça ? » Cette sensation, elle était tellement étrange. Inexplicable mais agréable. Horriblement agréable. « Elle est là, rattrapez-les ! » Je tourne la tête vers la voix débutant de l'entrée de la ruelle. Sûrement le chauffeur et ses petits copains chasseurs de mutants. Et il nous met dans la merde. Je plonge mon regard dans celui de la jeune femme avant de lui glisser un léger coup de tête pour lui dire de courir. Je tente d'envoyer une même barrière de feu, ce qui fut un échec total. Je ne cours pas de risque, plus de mort sur de le dos s'il-vous-plaît. Alors je fonce sans me retourner et agrippe le bras de la jeune femme au passage avant d'envoyer une bourrasque de vent ouvrir une porte verrouillée. Je la fermais à notre passage, effrayée, essoufflée d'avoir été prise de cours. Mon dos glisse contre la porte maintenant verrouillée par une planche et je laisse mes fesses heurter le sol. Mes paumes glissent sur mon visage et mon regard fini par croiser celui de la jeune femme.« Ok. Je m'attendais pas à ça. » Bredouille, un peu perdue et même désolé. Voilà ce qui s'affiche sur mon visage.

Ce n'est pas normal, nous ne sommes pas normaux.

Heaven & Silver

Manquait plus que ça. Des connards qui ne s'arrêterons pas de nous traquer jusqu'à ce qu'on disparaisse pour de bon. On est pas des monstres bordel ! Nous aussi on peut ressentir des choses ! On est humain. Des humains qui ont fait une belle connerie, mais les erreurs ils connaissent pas ? C'est "humain" non ? Bande de cons. Trop radicalisés dans leur système "parfait" que pour faire face à l'inconnu, à ce qu'il leur est différent. C'est idiot, méchant et égoïste. Mais je suis pas là pour faire de la philo, je me fais courser par une bande de tueurs donc si je pouvais ne pas trop réfléchir et courir le plus vite possible, ça m'aiderait beaucoup. L'espace d'un instant, je voudrais bien être à la place de cette fille pour pouvoir m'envoler. Pourquoi elle ne le fait pas elle d'ailleurs ? Elle veut peut-être voir si je m'en sors. Elle a pas l'air si méchante, pourquoi je suis obligée d'être toujours aussi méfiante ? Ca m'énerve, je m'énerve. Rapidement, on s'éloignait vers une porte que je force d'un coup de bourrasque avant de la fermer derrière moi. Avec mon petit corps, je vais pas tenir très longtemps. Je peux toujours user de mes pouvoirs mais je ne voudrais pas tuer quelqu'un. C'est trop lourd, trop dur à supporter. Arrête un cœur qui bat, prendre la vie, c'est pas fait pour moi. Et pour cette fille non plus apparemment. Elle s'énerve à en pleurer. Enfin, une larme roule sur sa joue. Mon cœur se brise à voir des gens aussi horrifiés que moi de la situation dans laquelle on vit. Je ne bouge pas, je ne sais pas quoi dire, pas quoi faire. J'entends les aboiements, les cris et les coups contre la porte que je tente de bloquer avec une planche et mon dos.

On est piégées, et elle le sait autant que moi. Il va falloir se battre et je ne suis pas prête pour ça. Un objet longe ma colonne vertébrale avec agilité, comme si il embrassait parfaitement la forme de mon dos. Surprise, je me jette presque en avant en tournant le regard vers la "chose". Du... Lierre ? Oui, c'est ça. Du lierre vient de nous sauver la vie. Au plutôt cette fille. C'est quoi au juste ? Une fée ? Pas trop difficile à deviner en voyant ses ailes. « Ils sont partis, je crois... » Je dépose mes mains sur mes genoux, apaisée mais toujours aussi méfiante, avant de me relever d'un coup sec. « Je compte pas vérifier. C'est peut-être mieux d'attendre la tombée de la nuit, on sera moins repérables. » Et avec tout ça, dans quelques heures il fera déjà nuit. Je lui glisse un demi-sourire, un peu confus, mais du moins franc et marche dans la pièce. C'est un atelier probablement. Enfin, je le déduis en voyant des plans et plein d'outils. C'est l'occasion de s'entraîner ! Mais j'ai une chose à faire avant. Je me retourne en déposant mes paumes sur la table derrière moi avant de hocher le regard vers la jeune femme. « Silver. Je m'appelle Silver. » Je marque une pause avant de reprendre, plus gentillement. « Et je voudrais savoir ce que tu m'as fait... » Ce n'était pas une mauvaise intention, j'en suis presque sûre. Mais je veux savoir ce qu'elle a projeté, combien de temps ça dure et ce qu'elle est.

Ce n'est pas normal, nous ne sommes pas normaux.

Heaven & Silver

Pour le moment, on est à l'abris. Mais comme je le dis, pour le moment. Je ne sais pas combien de temps va tenir ce lierre ni combien de temps vont mettre ces connards pour revenir. On ne peut compter que sur nous-même sur ce coup là. Sur un peu tous les coups maintenant je dois dire. Mon regard rencontre celui de la jeune femme dont je ne connais pas encore l'identité, avant de se déposer sur ce qui nous entoure. C'est ainsi que je me dirige jusqu'à une petite table de travail pour m'y appuyer en faisant face à ma compagne de galère. Je lui balance ma première question au visage après m'être présentée. Elle se présente également en disant s'appeler Heaven. C'est un joli nom, je souris. Il y eu un petit silence avant que s'exprime sur le fond de son geste. « Le jour où je t'ai vu passer, ton aura m'a touchée. J'ai sentie beaucoup de tristesse, ce genre d'émotions qui ronge la bonne humeur et les bons souvenirs pour ne laisser qu'une enveloppe corporelle vide. je connais cette tristesse puisque je l'ai vécu. alors, avant qu'il soit trop tard... je t'ai envoyé une force positive... je suis désolée si cela t'a causé des problèmes. » Je fronçais les sourcils, démunie. Mes bras avant appuyés sur la table étaient tantôt croisés, tantôt tendus. J'ouvrais la bouche à plusieurs reprises avant de le ferme de nouveau en glissant une main dans mes cheveux, tâchant de rester stoïque.

Elle lève doucement son regard vers moi en reprenant. Souffrir. Comment peut-elle ? Pourquoi ? Je me sens nue, complètement nue. Et mon regard contrit, offusqué et presque blessé en est la preuve. Je balbutie, haussant la voix, en me redressant de la table. « Je... Tu te trompes ! Je vais très bien, ça se voit non ? » Techniquement, je ne souris pas. Je suis trop en colère, contre elle, pour faire passer cette colère que j'ai en moi depuis que je suis malheureuse. Elle a voulu m'aider, et résultat, je suis toujours aussi égoïste. Très charmant Silver. La palme d'or de la fille la plus compréhensive de l'univers, franchement. Ma conscience applaudit ironiquement, le sourire à l'envers. Elle va pas m'énerver non plus elle. Une nouvelle main dans ma chevelure, je lève le regard vers la jeune femme. Il s'adoucit. « T'es quoi au juste ? Une fée ? » Je fronce les sourcils, ma voix est devenue plus reposante. Je ne peux pas lui en vouloir, c'est sur moi que je dois être en colère. Pour ne pas chercher à connaître le bonheur. Je la laisse épiloguer et fouille dans les armoires, envoyant tout ce qui pourrait m'être utile dans mon sac, histoire de pas avoir à payer trop de trucs pour ce mois ci. Je m'arrête un moment en dirigeant un énième regard vers la jeune femme. Je bouge partout, je ne sais pas rester en place. La pièce est fermée, j'aime pas ça. Je me sens oppressée, il me faut de l'air. « Désolée, je peux pas attendre la nuit. » Je fonce vers le lierre en envoyant une bourrasque de vent depuis ma paume gauche. Pas moyen de faire bouger la plante, elle est ancrée. Mon cœur se serre, il me faut de l'air. J'abats mes poings sur la plante à m'en ouvrir les phalanges. Ce qui ne tarde pas à arriver.   

Ce n'est pas normal, nous ne sommes pas normaux.

Heaven & Silver

J'ai mal à l'âme, mal à mon orgueil, mal à mon passé. J'ai le mal dans la peau finalement. Il est imprégné en moi comme une trace de feutre indélébile sur un vêtement blanc. Voyant et tenace. Voyant pour ce genre de cas en tout cas. Moi qui pensais que sourire était suffisant... Je lui pose des questions, un tas de questions auxquelles elle ne donne pas de réponse. Elle me regarde, me jauge. Je bouge partout et cherche constamment d'avoir quelque chose dans les mains. N'importe quoi. Alors je prends les meubles d'assaut et fouille en ne faisant plus attention à Heaven. C'est d'autant plus facile d'ignorer que d'affronter la réalité. Je suis une pro question "j'me défile". Habituel pour moi. Mes gestes sont brusques, rapides. Nerveux. Et même ma voix sans que je m'en rende compte. Le regard tantôt par ci tantôt par là, j'évite à tout prix de croiser celui de la jeune femme qui a l'air troublée, peut-être même offusquée de mes paroles ? Je sais que je dois me calmer, qu'il ne se passera rien. Mais il faut que je sorte de là. C'est trop dur, c'est beaucoup trop dur.

Dernière solution, la porte. J'abats mes poings contre la couverture verte qui couvre notre seule issue avec rage, ce qui ne fait que renforcer l'obstacle. Je grogne et injure, les dents serrées. Calme toi ! Pas moyen d'écouter ma conscience que je recale dans un coin de mon cerveau, là ou sont toutes les idées logiques que je n'ai jamais écoutées. Irrécupérable hein ? Soit. Je me fais couper de court lorsque Heaven s'approche de moi et essaie de m'arrêter. Si elle continue, je vais lui faire du mal. Et j'avais presque oublier sa présence, silencieuse comme elle est. Elle me saisit les mains, m'obligeant à me retourner et me demande pourquoi. Pourquoi je fais ça. Je ne calcule pas l'intensité de ma voix et calme presque. « J'ai peur ! » Voilà qui est dit. Sauvage souvenir de la cave et de mon père, objet de tant de cauchemars. Et lorsque, dans mes paroles, j'avais retiré mes paumes, je balayais tout sur mon passage d'un simple coup de main. Bordel... Un long silence. Pesant. Je remonte doucement le regard vers elle, un regard affolé, surpris, je ne sais pas. Des sentiments contradictoires s'y mélangent. Aussi bien que dans mon regard que dans ma tête. Je recule instinctivement, manquant de me planter avec mes jambes tremblantes. « Je... Je suis désolée. » Bravo ! Ca va changer les choses au fait que je lui ai fait peur ! Au moins elle n'a rien. C'est déjà ça.